Madame Guyon 
    L'autre jour j'ai été à la librairie d'occasion Audran, à Montmartre. Notamment trouvé, 2 euros seulement, le tome II de l'anthologie d'Alan Boase, The Poetry of France. Poèmes de la fin du 17e intéressants, sans être florilégeables sans doute.
    Tels ceux de Madame Guyon, la mystique quiétiste. Je suis un mystique moi-même, il faut dire, un mystique de la poésie parfaite. Le genre de type qu'on doit abattre. (D'ailleurs, elle, le pouvoir de l'époque voulut l'enfermer !)


          Hélas ! mon coeur est plein de rouille,
          Que cause ma propriété :
          Si j’ai de vos dons, je les souille ;
  Mettez-le, Mon Seigneur, dans votre vérité.

  Ah ! faites-le passer sous la meule avec l’eau ;
  N’épargnez point les coups, mais lavez son ordure ;
  Non, ce n’est pas assez ; formez-en un nouveau
      Qui n’ait plus rien de l’humaine nature.

  Vous avez un moyen qui me paraît plus court :
          Mettez-le dans votre fournaise,
  Daignez le consumer du feu de votre amour ;
  Il fera plus d’effet que la plus forte braise.

          Mes yeux fourniront assez d’eau
          Pour laver mon coeur infidèle :
  Mais, ô divin Amour, sans ce sacré fourneau
  Il pourra contracter des souillures nouvelles.



    Autre :


          FOI SANS ASSURANCE

         AIR : Mon cher troupeau

Pour contempler l'essence nue,
Il faut la nue et pure foi ;
Lorsqu'en Dieu l'âme est parvenue,
Il ne reste plus rien de moi.

Si je me faisais quelque forme,
Si je me figure un objet,
Je rends mon Dieu semblable à l'homme
Et me trompe dans mon sujet.

Si c'est Jésus que je contemple,
D'un œil simple autant qu'épuré ;
Si je me forme à son exemple,
Mon état est très assuré.

Sans me former aucune image
Avec lui me perdant en Dieu,
Je la trouve sans nul partage,
Sans différence, temps ni lieu.

Tel qu'il est au sein de son Père,
Je le trouve et m'abîme en lui :
Tel qu'il était sur la terre
(7 pieds !?)
Il règle ma vie aujourd'hui.

Lorsque l'âme est redevenue
Simple comme un petit enfant,
C'est alors que l'Essence nue
Est sa force et son aliment.

Divin moteur de toute chose,
Principe de la Vérité,
Qu'en toi seul mon esprit repose
Et s'abîme en l'immensité.

Ah ! que ce langage est barbare
Pour exprimer ce qu'on conçoit !
Car ce qu'on éprouve est si rare
Que rien en nous ne l'aperçoit.

Là, transporté hors de soi-même,
On entre en un pays nouveau,
Où Dieu qu'on adore et qu'on aime
Sert de sépulcre et de berceau.

Là les puissances suspendues,
Sans discerner ni mal ni bien,
Là les âmes en Dieu perdues
Ne voient plus même leur rien.

Là l'on vit et l'on meurt sans cesse,
On trouve la vie et la mort ;
La douleur devient allégresse ;
Si je disais tout, j'aurais tort.

Mise en ligne : mercredi 7 avril 2010, 05:26
Classé dans : Causeries

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